Itinéraire d’une vélotafeuse : de St Victor à St Jérôme, le sas de décompression de Sandie

Cet après-midi là, il flotte dans l’air comme une odeur de pin, d’herbes folles et de fleurs fraiches aux abords du Cloitre. Nous avons rendez-vous chez le Paysan urbain, une ferme sociale et solidaire au cœur du 13e arrondissement pour y rencontrer Sandie Lachouette, sa codirectrice. Vélotafeuse accomplie, Sandie parcourt chaque matin près de 8 kilomètres pour rejoindre cet écrin de verdure insoupçonné dans les quartiers Nord. Posée à l’abris sous une serre, elle nous raconte l’expérience qu’elle renouvelle quotidiennement, avec plaisir.
Qu'est-ce qui t'a fait choisir le vélotaf ? C'est quoi ton « déclic vélo » ?
C'est la circulation marseillaise qui m'a décidée. Et puis des raisons personnelles de ne pas avoir envie de prendre le véhicule tous les jours. Le vélo, pour moi qui ai un travail très mental, très cérébral derrière un ordinateur, c'est aussi l'occasion de faire un peu de sport dans la journée et de compenser mon activité mentale par une activité physique le matin et le soir.
J'utilise mon vélo pour aller au travail depuis environ 3-4 ans maintenant. Mais j'ai commencé à circuler à vélo à Marseille il y a environ 5-6 ans, d'abord dans ma vie personnelle. C'était à une époque où je suis revenue sur Marseille, où j'avais un véhicule mais pas forcément envie de l'utiliser tout le temps. Je restais dans Marseille et ne sortais pas de la ville pour mon activité professionnelle ou personnelle. À Marseille, le vélo se passe très bien pour moi, et comme les transports sont assez difficiles, ça me permet de circuler à toute heure sans contrainte.
Qu'est-ce qui te plait dans ce mode de déplacement ? C'est quoi tes petits bonheurs à pédale ?
Ce qui me plaît, c'est d'être dehors, de ne pas être enfermée dans un véhicule ou dans un transport en commun. D'être libre de mes mouvements, de ne pas attendre un bus ou un métro. Et aussi de pouvoir transporter des choses - quand on est à pied, on a un sac à dos qui devient vite lourd, alors qu'avec le vélo, j'ai des sacoches.
C'est vraiment un SAS de décompression, un moment de transit entre ma vie professionnelle et ma vie personnelle. Je prends mon temps, je mets généralement environ 40 minutes pour faire le trajet. C'est important pour mon équilibre d'avoir ce moment pour mettre mon corps en mouvement.
Je gagne aussi du temps par rapport aux transports en commun - en bus, je mettrais environ une heure, donc je gagne au moins 15-20 minutes par trajet.
Un lieu/un point de vue/un bâtiment/un paysage que tu as découvert à vélo dans les quartiers Nord ?
Ce que j'observe plus quand je suis à vélo qu'autrement, ce sont par exemple les gros mimosas qui explosent à la sortie de l'hiver, juste en dessous d'ici. Il y a aussi des glycines sur la route, dans des maisons que je croise vers Malpassé.
Je vois aussi l'évolution de la ville : des maisons qui se détruisent pour construire des immeubles, les nouveaux revêtements, les pistes cyclables qui apparaissent. On observe bien plus ces détails quand on est à vélo que quand on est en voiture ou en transport.
Une anecdote, un truc inédit qui t'est arrivé en vélotaf ?
Je me fais souvent repérer ! Les gens me voient alors que moi je ne les vois pas forcément parce que je suis très concentrée sur mon trajet. J'ai un vélo orange et en hiver j'ai une doudoune jaune, un manteau jaune et un casque jaune, donc je suis très visible.
Souvent, des gens me disent 'Ah je t'ai vue passer par là' et parfois j'ai des rencontres avec des personnes qui me font des coucous. Même en voiture, des fois des gens me klaxonnent. Quand on est à vélo, on n'a pas la carapace de la voiture, on est complètement exposé aux éléments et aux regards.
Comment le vélotaf influence ta vie pro ?
J'ai l'esprit plus clair, et puis comme je disais, il y a cet équilibre entre travail mental et travail physique. Quand j'arrive au bureau ou quand j'arrive chez moi, il y a des choses qui se sont traitées dans ma tête pendant les 40 minutes de trajet. J'ai eu le temps de réfléchir à tout ce qui s'est passé dans la journée. C'est un vrai équilibre pour mon activité professionnelle, et je pense que ce serait plus complexe sans cela.
En tant que vélotafeur, qu'est-ce que tu attends de ton employeur pour te faciliter le trajet ?
Déjà, le fait qu'on ait cette prime mobilité durable de 35€ par mois. Ça paie quasiment le forfait de vélo de la métropole. Au Paysan Urbain, on incite de plus en plus les salariés à prendre le vélo ou la trottinette avec cette prime.
On a aussi un espace dédié avec des accroches-vélo qu'on s'est fabriqué nous-mêmes. L'étape d'après, ce serait peut-être d'avoir des vélos de fonction, mais on n'y est pas encore. On a aussi une flotte de vélos qui est un peu hors service en ce moment, mais qu'on pourrait réparer et mettre à disposition de l'équipe pour les rendez-vous extérieurs.
Qu'est-ce qui rendrait ton trajet plus agréable aujourd'hui ?
Un vrai revêtement sympathique, des pistes cyclables, une acculturation des marseillais au vélo ou aux cyclistes plus largement. Entre le revêtement de la route qui est tout pourri, le fait que j'ai peut-être 10 minutes de piste cyclable sur mon trajet (et encore, je suis généreuse), et les automobilistes qui sont parfois très dangereux, ça fait qu'il faut être très concentré.
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Acteur majeur dans le développement économique et territorial de Marseille Nord, le réseau redéfinit l’avenir des quartiers nord de Marseille. Né de la fusion entre deux réseaux historiques : Entrepreneurs en Zone Franche et Arnavant, Marséa Nord Développement (anciennement Cap Au Nord Entreprendre) fédère les entreprises, agit pour la transformation et l’attractivité du territoire et défend les intérêts des acteurs économiques auprès des décideurs.